Au cœur de l’été, quand la plupart des gens ne regardaient pas, un gouvernement Tory cherchant à regarnir ses coffres a tranquillement rendu plus difficile pour les immigrants de commencer une nouvelle vie au Canada. Des milliers de jeunes adultes qui se qualifiaient comme personnes à charge ne peuvent plus faire le voyage sur les basques de leurs parents. Le nouveau critère, qui a pris effet le 1er août, a bouleversé les défenseurs des immigrants et des réfugiés et déclenché une nouvelle ronde dans une querelle en cours entre le parti au pouvoir et ses critiques à l’Association du Barreau canadien.
Jusqu’à la fin de Juillet, les enfants de nouveaux immigrants pouvaient venir au Canada en tant que personnes à charge jusqu’à ce qu’ils atteignent 21 ans. Les nouvelles règles fixent le plafond à 18 ans. La raison est que les enfants qui arrivent au Canada plus tôt peuvent bénéficier d’une éducation au Canada et finalement, offrir plus à notre économie fragile que leurs homologues plus âgés.
Les nouvelles règles disqualifient ces soi-disant profiteurs, mais elles vont bien plus loin et visent des jeunes de 19 ans qui pourraient à peine être sortis de l’école secondaire et les enfants de réfugiés potentiels qui attendent une réinstallation. Les données fédérales suggèrent que 7,832 personnes à charge admissibles en 2012 étaient âgées de plus de 18 ans, soit environ 10% de tous les enfants à charge sous l’ancienne définition. Les seuls de ce groupe qui sont maintenant admissibles sont les candidats entre 19 et 22 ans qui souffrent d’un handicap mental ou physique.
Le gouvernement a fait valoir ses arguments dans la Gazette du Canada l’an dernier. « Les statistiques démontrent que les enfants plus âgés qui sont à charge, ont des résultats économiques plus faibles sur le long terme », peut-on lire dans l’analyse, qui a souligné que 66 782 candidats en 2012 seraient encore qualifiés maintenant.
Kenney a finalement déménagé dans un autre secteur, mais sa politique a survécu, malgré les vagues de désaccord provoquées par une deuxième consultation l’année dernière. Soixante présentations se sont largement opposées au changement. Le Conseil canadien pour les réfugiés (CCR) a averti que la politique briserait les familles et que les personnes à charge seraient laissées sans défense, dans des conditions dangereuses. Loly Rico, présidente du CCR, a dit à Maclean que les conservateurs qui ont des enfants devraient y réfléchir et « ne doivent pas vraiment avoir un cœur. » Mario Bellissimo, président de la section nationale du droit de l’immigration de l’Association du Barreau, dit qu’une logique purement économique permet au gouvernement d’exercer plus de contrôle sur qui s’installe au Canada, mais endommage le modèle d’immigration du pays, parce que chaque personne à charge potentielle laissée pour compte pourrait fournir un avantage au pays au bout de la ligne. « Vous assistez au spectacle d’entités économiques entrant dans la société canadienne sans le soutien qu’elles pourraient avoir plus tard de personnes qui les entourent et les soutiennent dans les moments de maladie, lors de l’éducation des enfants, lors de perte d’emploi » dit-il.
Kenney a refusé de parler à Maclean sur cette histoire, mais Arthur Sweetman, un professeur d’économie à l’Université McMaster et co-auteur d’un document de 2001 mentionné dans les analyses du gouvernement, dit que l’immigration vers la fin de l’école secondaire est « perturbatrice »: l’apprentissage d’une nouvelle langue est difficile à ce moment-là et les jeunes enfants ont plus de facilité à combler un écart de qualité entre les systèmes d’éducation de deux pays différents. Mais il admet que les enfants plus âgés sont souvent en mesure de surmonter ces difficultés.
Il est trop tôt pour dire combien de familles seront obligées de se diviser ou de construire une nouvelle vie ailleurs, ou quel coût pour notre économie sera de perdre des parents travailleurs qualifiés. Bellissimo n’a que des preuves anecdotiques de l’impact sur les familles. Rico dit qu’elle en saura plus dans six mois. Pendant ce temps, les conservateurs semblent concentrés sur leur message économique. On ne sait pas comment le vote immigrant, conquis de haute lutte, répondra face au changement, mais le mantra de l’économie est d’abord une position politique que les conservateurs envisagent de conserver jusqu’au vote.
Source: Macleans
Commentaire de l’avocat Colin Singer:
Ces réformes sont parmi les plus sévères du gouvernement conservateur actuel, qui a radicalement changé le paysage de l’immigration au Canada depuis sa prise de pouvoir en 2006.